La Villa est le 20ème long métrage de Robert Guédiguian.
Comme souvent dans ses films, on y retrouve ses trois acteurs fétiches (Ariane
Ascaride, Gérard Meylan et Jean-Pierre Darroussin) et comme cadre la ville de
Marseille et ses calanques. Ce film sonne comme un testament, une sorte de
bilan familial et politique sur le temps qui passe, à la fois mélancolique et
bienveillant.
Un drame familial
La Villa débute face à la mer. Maurice, assi sur sa terrasse
face à la mer, fait un arrêt cardiaque. Ses trois enfants, Angèle (Ariane
Ascaride), Armand (Gérard Meylan) et Joseph (Jean-Pierre Darroussin) se
retrouvent donc ensemble dans la maison familiale pour régler les affaires
d’héritage et pour s’occuper de leur père, resté à l’état végétatif. Cette réunion
forcée va donner lieu à des introspections, faire ressortir des rancoeurs
passées et mener au pardon. Pourtant, loin de tomber dans le pathos exagéré, la
Villa est empreinte d’une douceur qui fait la force du film.
Cette maison d’enfance est un personnage à part entière,
symbole à la fois de l’union et du déclin d’une famille, lieu de pertes et de
retrouvailles. En effet, en parallèle du deuil des parents, Angèle doit aussi
faire le deuil de sa fille, Blanche, décédée d’une noyade des années plus tôt alors
qu’elle était sous la surveillance de Maurice et d’Armand. Son retour dans la
villa va faire ressurgir des souvenirs qu’elle pensait enfouis.
Le trio fétiche de Guédiguian fonctionne à merveille et nous
donne l’impression d’être devant une vraie fratrie. Pour renforcer cet effet,
le réalisateur fait appel à un flashback issu d’un de ses anciens films (Ki Lo
Sa?, 1985), mettant en scène les mêmes acteurs au même endroit il y a 30 ans.
Tous les personnages qui gravitent autour de cette fratrie
sont également construits sur le principe de trios : Tout d’abord, on retrouve
Maurice, le père ainsi que Suzanne et Martin, couple voisin ami de longue date,
qui forment le noyau des anciens du village. Bérangère (Anaïs Demoustier),
fiancée de Joseph, Benjamin (Robinson Stévenin), amoureux d’Angèle et Yvan
(Yann Tregouët), le fils de Suzanne et Martin, viennent former le trio autour
duquel se développent les relations amoureuses. Enfin, un trio d’enfants
réfugiés est retrouvé et accueillis par la famille dans le dernier acte du
film.
Une critique sociale
Un certain nombre de drames qui marquent ces personnages
trouvent leur origine dans des faits sociaux. Joseph, ancien ouvrier, s’est
retrouvé licencié du jour au lendemain. Suzanne et Martin ont vu leur loyer
augmenter à mesure que le village s’est vidé et que les appartements ont
commencé à attirer les touristes l’été.
La Villa montre aussi le poids du temps sur ce village : les
personnages parlent avec nostalgie de l’époque où celui-ci était une communauté
idéale, animée et qui avait le sens du partage. Ces souvenirs contrastent avec
le présent, où les seuls figurants sont les militaires à la recherche de
réfugiés rescapés d’un naufrage.
Le film adresse donc une critique à certains aspects de la
modernisation de la société : le tourisme de masse a causé la ruine de ces
petites communautés, où quelques riches propriétaires ont mis en oeuvre la
désertification du village. L’idéal de Maurice, un petit restaurant familial
aux petits prix a lui aussi fait naufrage. On retrouve ainsi par moment une
opposition entre l’ancienne génération pour qui “c’était mieux avant” et la
plus jeune incarnée par Yvan et Anaïs, aux comportements bien plus intégrés
dans la mondialisation et dans la logique financière.
Malgré les difficultés, le film dégage un message d’espoir
et d’humanité, qui s’incarne à l’écran par l’accueil de trois enfants réfugiés
retrouvés dans les collines. Cet acte altruiste donne une nouvelle dynamique
aux personnages, il leur permet de tourner la page et de regarder vers
l’avenir.
La Villa est un vecteur d’émotions positives: du rire, des
larmes, et beaucoup d’amour.
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