Bienvenue à Suburbicon (2017) : Clooney se moque de l'Amérique

Pour son 6ème film, George Clooney revient avec une satire de la société américaine des années 50 (à l’instar de son film à succès Good Night, And Good Luck, sorti en 2005), et ressort du placard un scénario écrit par les frères Coen à la fin des années 80. En mélangeant petite et grande histoire, Bienvenue à Suburbicon réussit-il son pari ?



Le film débute comme une brochure publicitaire : Suburbicon est une ville pavillonnaire de 60 000 habitants qui incarne l’American Way of Life, très fière de la paisible communauté qu’elle a réussi à bâtir. L’équilibre va cependant être perturbé lorsqu’une famille noire s’y installe, les résidents blancs (et racistes), entrant dans une paranoïa qui ira grandissante tout au long du récit.
Parallèlement, un drame se déroule chez les Lodge, famille voisine, et parfaite en apparence. Alors que deux individus s’introduisent en pleine nuit dans la maison, Rose (Julianne Moore), la mère de famille, est assassinée. Les meurtriers se révèlent être des mafieux qui semblent avoir des comptes à régler avec Gardner Lodge (Matt Damon), le père de famille. Suite à ce décès, la soeur de Rose, Margaret, s’installe dans la maison pour veiller sur Nicky (Noah Jupe) qui vient de perdre sa maman.


Un casting aux petits oignons

Si Rose meurt très vite au début du film, il n’en est pas fini de Julianne Moore. En effet celle-ci joue également le rôle de Margaret, soeur jumelle de la défunte. Sa performance est remarquable, et nous prouve une fois de plus qu’elle est l’une des meilleures actrices de notre époque. L’actrice excelle à représenter toute la palette des émotions, et parvient particulièrement bien à nous mettre mal à l’aise : un seul de ses sourire suffit à donner envie de partir en courant !



Matt Damon est lui aussi très convaincant dans ce rôle d’homme faussement ordinaire qui lui va comme un gant. Clooney l’a justement choisi pour cette raison : il serait le seul acteur d’Hollywood très célèbre qui n’ait pas une “tête de star”.
Nicky, fils de Gardner et Rose n’est pas en reste. Noah Jupe, à seulement 13 ans, assure à fond son rôle et suscite une très bonne surprise. Son personnage est central à la compréhension de l’intrigue, le spectateur assemble les différentes pièces du puzzle au travers de ses yeux et de ses oreilles. Il sert de plus de lien avec le contexte d’effondrement de la communauté de par son amitié avec Andy, l’enfant noir de la maison d’à côté.


Satire sociale américaine


Suburbicon et sa communauté forment un personnage à part entière, évoluant indépendamment de l’intrigue principale mais dans la même direction et à la même vitesse. A mesure que les événements se précipitent chez les Lodge, la communauté s’embrase, victime de ses peurs irrationnelles et de son racisme. On assiste à une escalade de la discrimination et de la violence tout au long du film, les remarques désobligeantes se transformant en agression. Cette violence raciale forme la toile de fond du long-métrage, sans jamais venir en déranger l’intrigue principale. C’est ce qui fait à la fois la force et la faiblesse du film. Dans un sens, ce contexte apporte de la profondeur au drame familial car il permet de l’appréhender au travers d’un prisme historique (notamment le conditionnement par le milieu social). Ce dernier n’est cependant pas exploré assez en profondeur, on reste donc un peu sur notre faim.






Sur la forme, Bienvenue à Suburbicon est très influencé par les frères Coen. Les deux mafieux rappellent notamment les deux gangsters de Fargo, et la mise en scène fait “old-school”. On remarque par exemple la forte saturation des couleurs qui donne un ton très criard et qui contraste d’autant plus avec les événements.
La narration peine à trouver son rythme dans la première partie, heureusement cette lacune est comblée dans la deuxième moitié du film, où les événements s’enchaînent à grande vitesse avec fluidité, sans laisser au spectateur une seconde de répit.






Sans être parfait, Suburbicon alterne drame et comédie, est original, frais et rythmé. Il mérite amplement le détour !  

Libellés : , ,